400 régularisations obtenues par les sans-papiers grévistes
AFP/PATRICK KOVARIK Des salariés sans-papiers défilent le 1er mai à Paris |
Lancé par la CGT et l’association Droits devant ! ! le 15 avril, amplifié par une nouvelle vague le 20 mai, le mouvement de grève des travailleurs sans papiers de la région parisienne n’a abouti qu’à quelque 400 régularisations sur 1 400 dossiers déposés en préfecture.
Au-delà des cas emblématiques, souvent couronnés de succès, des salariés du restaurant de l’Ile de la Jatte à Neuilly-sur-Seine, de celui de L’Ile à Issy-les-Moulineaux, ou encore du Bistro Romain des Champs-Elysée, les occupations se poursuivent dans la restauration, mais aussi le bâtiment, le nettoyage, les services à la personne, le jardinage. Deux mois après le début de la grève, 41 entreprises franciliennes restent occupées. La CGT dénombre encore 600 grévistes.
Il a beau n’en compter que sept sur les 350 salariés de son agence, le chef d’établissement de Samsic à Massy, Mehdi Daïri, a "hâte" que cela se termine "au plus vite, sans bruit". Lorsque le 20 mai, ses salariés se sont présentés à lui pour lui annoncer qu’ils allaient squatter son agence jusqu’à ce qu’ils soient régularisés, ce responsable a fait le choix du pragmatisme.
Il a "tout de suite pris les choses en main" et constitué les dossiers de régularisation, qu’il a lui-même été porter à la préfecture. "C’est dans l’intérêt de tout le monde. Leur démarche est légitime. Ils sont là depuis des années, travaillent, cotisent, payent des impôts et nous, nous sommes satisfaits d’eux. Les licencier n’était pas la solution", dit-il, assurant être tombé des nues en découvrant leur situation.
M. Daïri reconnaît que "le fait de ne pas être seul responsable dans ce cas" lui a "ôté un poids". L’an passé, dans une autre entité du groupe, il avait été "obligé de licencier", à la suite de vérifications des papiers de ses salariés comme la loi l’oblige désormais.
Mener la démarche "individuellement, cela peut se retourner contre l’employeur. Mais là, le fait que cela s’inscrive dans un mouvement porté par la CGT et concernant plusieurs entreprises, cela rassure", avoue-t-il.
Au départ, il a "quand même appelé la police", ne concevant pas que les employés puissent "prendre en otage" ses locaux. Mais les forces de l’ordre ont répondu qu’elles ne pouvaient pas intervenir. Alors, "il a mis un vigile pour surveiller les lieux, mais très vite il l’a retiré", raconte Diara Dogo, un des grévistes mauritanien de l’entreprise, qui réside en France depuis six ans.
De fait, la cohabitation entre les grévistes, installés dans deux salles du rez-de-chaussée, et les membres de l’équipe de direction, qui travaillent à l’étage, est sereine. "Quand on arrive le matin, le café est prêt ", apprécie Stéphanie, une assistante qui descend volontiers, comme d’autres collègues, discuter dans ce qui sert de pièce à vivre. Dans la salle d’à côté, les matelas s’entassent.
Pour cinq des grévistes, qui travaillent pour Samsic depuis au moins deux ans, les choses sont allées assez vite : dès le 4 juin, ils ont reçu un récépissé de régularisation. "Cela a a été un soulagement de savoir que l’on pouvait marcher dans la rue, travailler, la tête libre", témoigne Daïra Dogo.
Il n’a cependant pas repris le travail par solidarité avec ses deux collègues qui, à mi-temps ou encore en CDD, se sont vus exiger par la préfecture des preuves d’ancienneté dans l’entreprise de résidence en France. Pour tous, employeur et salariés, le temps est long. Durant la grève, il faut continuer à payer le foyer et les factures, rassurer les familles au pays qui s’inquiètent de ne plus rien recevoir.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 163 autres membres