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Le patronat de l'hôtellerie-restauration soutient les demandes de régularisation

LE MONDE | 21.04.08 | 15h35  •  Mis à jour le 21.04.08 | 15h35


Le piège serait-il en train de se refermer sur le gouvernement ? Ce week-end, le
mouvement de protestation des salariés sans papiers s'est étendu.

Samedi 19 avril, neuf salariés du très sélect restaurant Le Café de la Jatte à
Neuilly (Hauts-de-Seine) ont rejoint l'action. Et dimanche après-midi, cinq
autres encore du restaurant Charly Birdy, rue de la Boétie à Paris leur ont
emboîté le pas, soutenus cette fois les syndicats Solidaires et la CNT
Ile-de-France.
Inédite, cette grève coordonnée et simultanée, lancée par la CGT le 15 avril,
touche désormais plus de 500 salariés sans papiers, entraînant le blocage d'une
vingtaine d'entreprises franciliennes de la restauration, du bâtiment et du
nettoyage.

Le gouvernement n'entend surtout pas accorder trop d'importance au mouvement.
Matignon a ainsi annulé un rendez-vous avec un syndicat de
l'hôtellerie-restauration, le Synhorcat. "Nous ne sommes pas sur un phénomène de
masse. A Paris, pas plus de 400 demandes de régularisation ont été déposées",
explique-t-on au cabinet du ministre de l'immigration, Brice Hortefeux, où l'on
se contente pour l'heure d'un rappel des principes. "C'est aux préfectures qu'il
appartient d'apprécier, au cas par cas, les demandes de régularisation en
prenant en compte les tensions existantes dans certains secteurs",
rappelle-t-on. "L'application de l'article 40 doit rester marginale. Il n'est
pas question de pourvoir les besoins économiques par la régularisation de
sans-papiers. La priorité est de recourir à l'immigration régulière".

Le réalisme risque pourtant de s'imposer au gouvernement. D'autant que le
mouvement bénéficie du soutien des employeurs concernés. A peine avait-il été
lancé que les syndicats patronaux de la restauration ont officiellement demandé
au gouvernement la régularisation de leurs salariés sans-papiers. Le Medef se
tient pour le moment dans une expectative prudente, refusant de s'exprimer.

Pour André Daguin, président de l'UMIH, principale organisation patronale de
l'hôtellerie-restauration, si ce "coup d'éclat" lancé par la CGT n'est pas la
meilleure méthode, celui-ci n'en espère pas moins que ce "happening amènera M.
Hortefeux à régulariser ces salariés sans papiers déclarés par leur employeur".
"Il faut éviter d'agiter le chiffon rouge et d'effrayer la population. Mais
quand un patron a embauché un salarié, à la vue de papiers dont il ne sait s'ils
sont vrais ou faux, qu'il le déclare, paye ses charges, que le salarié lui-même
s'acquitte de ses taxes et impôts, comment peut-on continuer de parler de
travailleurs clandestins ? Il n'y a pas d'autre solution que de les régulariser.
On ne peut pas abandonner des salariés qui nous donnent satisfaction", insiste
André Daguin. Il estime à 50 000 le nombre de salariés concernés dans la
restauration. Et de rappeler : "Notre secteur crée chaque année 20 000 emplois
solde net. Et ces sans-papiers ont contribué à les remplir pour une part,
puisqu'ils ont été déclarés."

Le député UMP des Hauts-de-Seine, Frédéric Lefebvre, auteur de l'amendement qui
a conduit à ouvrir cette possibilité d'une régularisation par le travail, n'est
lui pas surpris du mouvement. "Nous avons levé un tabou, il est normal qu'il y
ait des actions collectives", relève-t-il. "Dans certains départements, les
régularisations seront nombreuses, dans d'autres il y en aura peu. L'essentiel
est que nous restions sur une logique économique", insiste le député qui se
félicite que la question soit portée par les partenaires sociaux, syndicats et
patronat.

Les parlementaires sont de plus en plus nombreux à être saisis par des
employeurs, qui se disent coincés entre la nécessité de garder des salariés dont
ils découvrent la situation irrégulière et le risque de sanctions judiciaires
pour emploi de clandestins. Le député PS de Paris, Jean-Christophe Cambadélis, a
annoncé dimanche avoir écrit à ses collègues parlementaires "pour proposer une
action de solidarité avec les sans papiers grévistes". "Travailleurs salariés,
ils manifestent pour obtenir des papiers, leur a-t-il écrit, si ce n'est pas
l'immigration choisie, ils ont été choisis par des employeurs, ils doivent donc
être régularisés. C'est à nous, parlementaires, d'agir".
Laetitia Van Eeckhout


    En Espagne, le patronat a été un acteur des régularisations

    Entre le 7 février et le 7 mai 2005, l'Espagne a procédé à une opération de
grande ampleur qui a abouti à donner un titre de séjour et de travail à près de
580 000 travailleurs étrangers sans papiers.

    L'opération a été négociée par le gouvernement avec les associations, les
syndicats et le patronat. C'est en réalité l'employeur qui devait formuler la
demande, en garantissant au salarié sans papiers un contrat de travail d'une
durée minimum de six mois. Cette exigence était réduite dans certains des
principaux secteurs employant de la main-d'oeuvre étrangère, comme l'agriculture
et pour les employées de maison. En contrepartie, l'employeur avait la garantie
de ne pas être poursuivi. De son côté, le sans-papiers devait démontrer qu'il
était arrivé en Espagne avant août 2004. L'administration a fait preuve de
grande souplesse pour cette dernière obligation.



21/04/2008
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